Ma fille Marina chez les indiens – suite – par Denise
Ma fille Marina chez les indiens – suite – par Denise
Quatre mois après la naissance de Mariana née à São Paulo, beau bébé de 3,4kg, André et Marina partent pour leur nouvelle mission, très au nord du Brésil….Alto Solimões – Amazonas.
Le voyage dure près de 24 heures pour arriver à destination : le village Vendaval des indiens TICUNA, au bord de la rivière Solimões (affluent de l’Amazone). Pour y arriver, un premier trajet en avion jusqu’à Manaus, puis jusqu’à Benjamin Constant, et la zone des trois frontières entre le Brésil, le Pérou et la Colombie. Ensuite, après une première traversée jusqu’à Tabatinga, ville frontière avec Leticia en Colombie, le voyage se poursuit en voadeira pour remonter le rio Solimões pendant 6 à 8 heures… avec un bébé de 4 mois !
Une voadeira
Le pédiatre consulté avant leur départ recommanda l’allaitement maternel aussi longtemps que possible et que la petite soit nourrie comme les indiens nourrissent leurs enfants. Ne pas penser à lui faire prendre jus d’orange, pomme ou soupe de légumes….et, ne pas lui donner de poisson avant que la petite ait 1 an.
Une fois sur place, ils s’installent dans une maison précaire, en bois et toit de tôle, à 30m de la rivière, sur les hauteurs, pour éviter la montée des eaux en période des pluies qui dure plus ou moins 6 mois.
André est préposé « chef blanc » responsable de toutes les activités qui existent et des nouvelles qui vont être implantées dans le village. Le travail de Marina est l’enseignement de la langue portugaise et des premières notions (cours primaire) aux enfants Ticunas.
1re difficulté : la langue Ticuna est une langue tonale, les hommes prononcent les mots avec une intonation différente de celle des femmes. Étant donné que c’étaient les garçons qui maîtrisaient mieux le portugais, Marina apprenait le Ticuna auprès des jeunes gens et ceci faisait la risée de l’audience puisqu’elle parlait comme un homme !
2e gros problème : une bonne centaine d’élèves se présentaient, des grands et des petits. Comment leur faire comprendre qu’une division du groupe était nécessaire et qu’il fallait respecter un horaire déterminé ?…Il n’y a pas de montre dans un village. Les indiens n’ont absolument pas la notion de la gestion du temps en fonction des travaux ou tâches à effectuer. Il fallait improviser les leçons en plein air, car la salle en principe réservée pour les classes, était beaucoup trop petite… Alors, tant bien que mal, Marina organisait un groupe dehors, assis par terre ! Les classes étaient plutôt orales, car cahiers et crayons n’étaient pas toujours disponibles et il fallait les distribuer à tour de rôle !
Les indiens ont un don d’observation très minutieux, de l’adresse et une habileté pour le dessin extraordinaires. Ils reproduisent dans tous les détails plantes et animaux. Un indien peut démonter une montre par exemple, et même sans savoir à quoi ça sert…la remonter à la perfection !
Un autre problème, plutôt un défi, a été de laver son linge dans la rivière et monter ce linge mouillé tout au long de la pente de 30 mètres jusqu’à chez elle, sans aucune aide ; les hommes ne font jamais un travail dû à la femme, et les femmes ont à s’occuper de leurs « affaires ».
André a demandé aux tenants de l’autorité dans le village, ce qui pourrait être fait et ce qui serait important pour eux. Leur réponse a été : une belle somme d’argent pour l’achat d’un bateau avec lequel ils seraient indépendants et pourraient vendre leurs produits et acheter ce dont ils avaient besoin, directement. Ils n’auraient plus à dépendre du regatão, nom donné au colporteur fluvial qui fait tout le commerce le long du fleuve de village en village.
La mandioca et le maïs sont les produits les plus abondants de la région et sont donc monnaie courante dans ces communautés riveraines. Par conséquent, le prix obtenu à la vente n’était pas élevé.
André eu l’idée de commencer une plantation de riz. Sans autre concurrence, le riz serait probablement vendu à bon prix. L’achat du bateau Rêvé, deviendrait possible !
Cela prit forme ainsi, et la montée des eaux à temps promettait une belle récolte. Mais voilà qu’un gros problème surgit. Il fallait que la cueillette soit faite très rapidement, avant que les eaux ne montent trop haut, et que tout soit noyé ! Faire comprendre aux indiens que ce travail devait être fait « d’une traite », n’a pas été facile, ni accepté de bon cœur.
Habitués à la récolte de la mandioca qui se faisait dans un climat de fête, hommes et femmes se rassemblaient pour cueillir ce qui avait été déterminé et pas un jour de plus. Ce qui n’était pas récolté attendrait sous terre l’année suivante.
Tant bien que mal André a fait de son mieux pour faire comprendre aux hommes que ce travail était pour leur propre bénéfice, qu’il n’était pas leur patron et… la récolte fut magnifique !!!
Cependant d’autres questions surgirent : où ranger tout ce riz ? Comment transporter cette précieuse marchandise ? Ils remplirent sacs, panières, tout ce qui était à leur portée et le succès fut extraordinaire !
Avec le résultat de la vente, l’achat du moteur et ce qui manquait à leur bateau furent complétés et ils réussirent à être plus indépendants, du moins pour les allées et venues à la ville la plus proche où se faisait le commerce.
La suite au prochain épisode !