Mais qui est donc Allan Kardec ?

Allan Kardec est le pseudonyme utilisé par Hippolyte Léon Denizard Rivail, un instituteur lyonnais du XIXe siècle. Il nait le 3 octobre 1804 à Lyon, l’année-même où Napoléon se fait sacrer empereur. Issu d’une riche famille de juriste, il décède le 31 mars 1869 à Paris.

Kardec est surtout connu pour son rôle dans la fondation du spiritisme, une doctrine philosophique et religieuse qui soutient l’existence des esprits et la communication avec eux par le biais de médiums. Il a développé et organisé les principes du spiritisme à travers une série de livres connus sous le nom de « Le Livre des Esprits » (1857), « Le Livre des Médiums » (1861), « L’Évangile selon le Spiritisme » (1864) et « Le Ciel et l’Enfer » (1865).

Kardec a prétendu que ces livres ont été dictés par des esprits supérieurs et qu’ils contiennent des enseignements sur la nature de l’âme, l’existence de Dieu, la réincarnation, la moralité et d’autres sujets liés à la spiritualité. Ses ouvrages ont contribué à l’établissement du spiritisme en tant que mouvement religieux à part entière, qui a connu une popularité considérable en France et dans d’autres pays à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle.

De plus en plus de brésiliens sont spirites

Les œuvres d’Allan Kardec sont encore des best-sellers. Il est courant de les retrouver dans les présentoirs des kiosques à journaux. Il existe des timbres à son effigie et des rues portent son nom. Allan (parfois écrit avec un L) fait partie des cent prénoms les plus donnés au Brésil. Un attaquant baptisé Alan Kardec a joué pour le club de football de Sao Paulo pendant trois saisons, de 2014 à 2016.

C’est au Brésil que l’on compte actuellement le plus de spirites. D’après le recensement de l’Instituto Brasileiro de Geografia e Estatística, en 2010, 2% des Brésiliens se déclaraient spirites, soient environ 4 millions de personnes. Une minorité à l’échelle du pays, mais ce chiffre a augmenté de 65 % par rapport au recensement de 2000. Et ce nombre est à revoir à la hausse car dans la réalité, nombreux sont les Brésiliens à être catholiques et spirites.

Pourquoi Allan Kardec est-il si connu au Brésil ?

Les écrits de Kardec, publiés en France au XIXe siècle, ont été rapidement traduits en portugais et suscité un grand intérêt au Brésil.

Dès 1858, les élites brésiliennes entendent parler de cette nouvelle doctrine qui enflamme l’Europe. Les premiers salons de «tables tournantes» apparaissent à Bahia, puis à Rio à partir de 1865.

Après avoir conquis les villes, le spiritisme atteint les campagnes dans les premières années du XXème siècle grâce à l’itinérance d’un prosélyte de l’œuvre de Kardec, Cairbar Schutel (1868-1938).

Une raison du succès du spiritisme au Brésil tient à la diversité culturelle de sa population et aux formes de syncrétisme et aux pratiques médiumniques qui existaient déjà au moment de son introduction. «Beaucoup de gens qui arrivaient dans les villes brésiliennes étaient déjà imprégnés de croyances magico-spirituelles. Dans le contenu, le spiritisme est très proche de ces croyances naturelles. La transition entre les deux se faisait sans problème », explique Guillaume Cuchet, professeur d’histoire à l’Université Paris-Est-Créteil et auteur de « Les Voix d’outre-tombe. Tables tournantes, spiritisme et société au XIXe siècle » (éditions du Seuil).

Le spiritisme au Brésil s’identifie également à l’action sociale avec l’ouverture de bibliothèques et d’école maternelles. Les médiums-guérisseurs deviennent célèbres comme Chico Xavier, décédé en 2002 mais auteur de plus de 400 livres, invité des émissions de télévision, nommé deux fois pour le prix Nobel de la paix. Les centres d’accueil sont nombreux, proposant actes de soins et conseils juridiques. Le spiritisme est enseigné à l’université publique de São Paulo (USP). Il possède ses musées, à Curitiba et à São Paulo. Il a ses émissions de télévision. Son rôle dans le développement du pays a été officiellement reconnu par les députés. Depuis 1949, le 18 avril est consacré « Dia do Espiritismo ».

Ce sont les régions du sud-est brésilien (État de Rio, Sao Paulo et Minas Gerais) qui affichent le plus haut taux de spirites. La commune de Palmelo (2 770 hab. en 2021), située dans l’Etat de Goiás au centre du pays, voit 45% de sa population se réclamer de la philosophie d’Allan Kardec. Elle s’est elle-même surnommée la capitale brésilienne du spiritisme.